Le 8 mars est une date toujours intense pour la cause féministe. Ce 8 mars n’a pas échappé à la règle, bien au contraire. Porté par les dernières tempêtes qui ont soufflé sur la cause féministe et les révélations qui ont frappé à Hollywood et ailleurs, ce 8 mars a pris une tournure encore plus médiatique que les années précédentes. Pourtant, si cette date est nécessaire pour faire un point sur les avancées et le chemin qui reste à parcourir, elle est très insuffisante pour créer les conditions de la transformation attendue.
Je suis féministe, en tout cas, j’essaie, par mes actes, d’incarner ce combat majeur pour notre modèle de société, parce que je crois à la perfectibilité de l’Homme et de ses modes de fonctionnement par l’inclusion. Je le fais probablement aussi, au nom de mes grand-mères, de ma mère, symboles à mes yeux de ces femmes qui n’ont pas eu le droit de choisir totalement, pleinement, leur vie.
Un 8 mars, n’est donc pas une date anodine, ce 8 mars-là, encore moins. J’ai donc organisé un petit déjeuner avec les femmes de mon entreprise, pour poser sur la table 3 sujets majeurs: L’obligatoire mixité dans les instances de direction, de décision et de projets ; l’égalité salariale, son contrôle et son suivi ; et surtout la libération de la parole quand aux comportements inadaptés ou les violences qu’elles peuvent subir dans l’entreprise ou dans les trajets professionnels. Un moment précieux et dense. Une façon aussi de comprendre que toutes les générations n’ont pas la même lecture du combat à mener et que quelque chose de profond a d’ores et déjà changé pour les plus jeunes d’entre elles, dont le gène de la liberté n’a pas été inhibé.
J’ai ensuite rejoint mes partenaires de #JamaisSansElles qui participaient à l’ouverture de la conférence pour les droits des femmes dans le monde, autour de Nathalie Loiseau, Ministre des Affaires Européennes. J’ai été ému et fier de voir Tatiana Salomon et Guy Mamou Mani, co-présidents de l’association que nous avons fondée il y a juste 2 ans, prendre la parole pour annoncer un partenariat entre la diplomatie française et Jamais Sans Elles.
Notre jeune association démontre en permanence qu’elle est plus forte que nous, que l’efficacité et la modernité de l’idée qu’elle incarne, emporte beaucoup de nos doutes sur son passage et que décidément « rien ne peut arrêter une idée dont l’heure est venue. »
Enfin, j’ai suivi toute la journée les différents évènements, les prises de paroles des responsables politiques, économiques et journalistiques, dans les medias et sur les réseaux sociaux. Au terme de ce 8 mars, reste l’étrange sensation d’un grand cirque où chacun essaie de tirer plus ou moins adroitement les marrons du feu, dans une opération du « Pink Washing » parfois très proche d’une Saint Valentin bis, aux antipodes des enjeux que représentent la défense et l’application des droits des femmes.
Bref, un 8 mars, avec ses bienfaits et ses excès, ses promoteurs et ses récupérateurs, une journée vibrante et enthousiasmante pour certains d’entre nous, et finalement, malgré ses excès et ses ratés, c’est probablement bien ainsi, une journée dans son temps. Cependant, nous savons également que si les journées symboles permettent de mettre en lumière les justes causes, et qu’il faut des 8 mars pour nourrir la machine médiatique, au final, tout se joue le 9. Une fois retombée la médiatisation, une fois fermées les tables rondes, une fois éteins les projecteurs, une fois passés les effets euphorisants d’une journée de reconnaissance, vient le retour à la réalité, crue, nue, implacable et qui nous rappelle que tout se joue le 9 mars et les jours suivants, loin des plateaux, des estrades et des micros ;
tout se joue dans cette classe d’école où un instituteur enseigne à un petit garçon le respect de sa camarade ;
tout se joue dans cette famille où un père ou une mère explique à sa fille qu’elle a droit à la vie, toute la vie, tous les possibles et toutes les ambitions ;
tout se joue dans ces entreprises où les dirigeants et les actionnaires, prennent la décision que plus aucune instance de gouvernance, de décision, de projet ne peut valablement se mettre au travail sans mixité, voire sans parité ;
tout se joue dans toutes les organisations politiques, syndicales, patronales, où des femmes osent franchir les parvis qui mènent au combat ;
tout se joue dans cette association où un bénévole offre une oreille attentive et réparatrice à celle qui a encore honte de porter plainte ;
tout se joue dans toutes les rues de tous les pays où des héroïnes défient les conservatismes mortifères en arrachant les voiles de l’asservissement pour en faire les étendards de leur liberté.
Il faut des 8 mars, oui, pour donner le coup d’envoi sous le crépitement des flash, mais c’est au matin du 9 que commence vraiment la partie. Alors, en ce 9 mars, venue de ne je sais où j’entends résonner la voix de Sœur Emmanuelle, et son cri joyeux, cette invitation à l’action et au bonheur de faire : Yalla !
Moi aussi fils, frère, mari et père, Administrateur bénévole du Laboratoire de l’Egalité, je souscris au réalisme de votre commentaire : les « là où tout se joue » sont cruciaux, et démontrent que le 8 mars (et les annonces faites par le Gouvernement) ne vont résoudre les problèmes.
Merci Monsieur Xavier Alberti,
et ainsi soient-elles !
Sans haine d’amour….
Meyer-Vacher